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3 février 2009 2 03 /02 /février /2009 13:29

La refondation du processus de Barcelone, par l’Union pour la Méditerranée, fut mise à la rude épreuve par l’agression contre Gaza. L’initiative française de créer l’Union de la Méditerranée - fut-elle redimensionnée par l’Union Européenne - apparaissait comme une gageure, dans la mesure où elle intégrait, dans un partenariat régional pour la paix, un Etat occupant des territoires de trois partenaires de l’Union envisagée et confortait sa politique coloniale, par une "pacification", usant tous les moyens de dissuasion et tous les ingrédients du terrorisme d’Etat. Cette situation d’évidence ne pouvait être occultée. La guerre  contre Gaza et les atrocités commises remettaient en cause le discours de partenariat et de coopération.

Un traitement de faveur injustifié : L’analyse des accords de l’Union Européenne avec ses partenaires du Sud révélait les avantages supplémentaires accordées à Israël, qu’on semblait considérer comme un prolongement humain et stratégique de l’Europe. Une politique de tolérance fermait volontiers les yeux de certains de ses acteurs et de la plupart de ses médias et tentait d’orienter, avec plus ou moins de bonheur, ses opinions publiques. Nous remarquerons heureusement, que la conscience humanitaire européenne parvenait souvent à transgresser ce "politiquement correcte", contraire au patrimoine de l’éthique, des Droits et de la citoyenneté responsable. La remise en question de l’indulgence vis-à-vis de l’occupant n’était pas à l’ordre du jour. Qu’on se rappelle le statut privilégié que l’Union Européenne lui a réservé, à la veille de l’invasion de Gaza. Conforté par ce statut d’exception, se sachant impuni, il engagea sa guerre, à la veille de la prise du pouvoir par le nouveau président Obama, dont le discours de campagne annonçait l’application d’un paradigme nouveau, un itinéraire à baliser, pour la paix et la liberté.

Gaza et l’après Gaza :  Tentant de combler "le vide américain", le Président Sarkozy s’est investi, lors de la guerre, comme intermédiaire pour obtenir un cessez le feu. Ses voyages éclairs, sa mobilisation de la troïka européenne, ses concertations avec l’Egypte ont permis d’assurer une présence certes bénéfique sur la scène moyen orientale, mais qui n’a pas pu obtenir l’arrêt de l’agression. D’autre part, l’Union Européenne n’a pas réussi à redéfinir et à re-actualiser, par une prise en compte de la nouvelle conjoncture, la politique traditionnelle qu’elle appliquait dans le traitement du conflit israélo-palestinien. Son adoption, comme postulat, des "alibis" d’Israël et de sa lecture de l’événement comme "guerre contre Hamas", alors qu’il s’agissait bel et bien d’une agression contre la population palestinienne, en vue de consacrer le démembrement de l’Etat à construire,  rendaient son  approche ambiguë. D’autre part, le traitement de la résistance, pourtant légitimée par l’occupation, comme "fait de terrorisme", ne pouvait que surprendre lorsqu’il provient d’une aire bel et bien libérée du pouvoir nazi, par la résistance populaire. Une analyse lucide devrait néanmoins avertir les observateurs que les "espoirs brisés" étaient bien propices aux dérives néfastes pour tous. Ce grand risque n’est pas à dédaigner !

L’offre des pays européens, d’assurer la surveillance maritime de la région au profit d’Israël, "pour arrêter la contrebande des armes vers Gaza" prenait à son compte les alibis de l’Establishment israélien, empiétait la souveraineté des pays de la région et assurait de fait une gestion asymétrique des zones maritimes, dans la région. Une politique égalitaire, à l’instar de celle adoptée par le général de Gaulle, qui arrêterait le ravitaillement en armes de l’Etat belligérant, serait plus appropriée et plus crédible.

Conclusion :  En dépit de sa volonté de participer activement au traitement de la question palestinienne et de sa mobilisation pour les reconstructions périodiques des infrastructures démolies constamment par l’occupant, l’Union Européenne reste un acteur secondaire au Moyen Orient. La poursuite de sa politique traditionnelle, plus favorable à la gestion du conflit qu’à son traitement, n’est pas en mesure de changer la donne. Nous pensons plutôt, en adoptant les conclusions de Michael Emerson que «la crise de Gaza réclame une révision importante de la politique d'UE envers le conflit Israël-Palestine». La position de l’Union Européenne ne peut être en deçà de l’approche du nouveau pouvoir américain, qui adopte de nouveaux paradigmes de relations internationales.  Cette prise de distance par rapport à la carte géopolitique des alliances doit être soutenue et mise en œuvre pour instituer une nouvelle stratégie de sortie de crise et un règlement définitif, assurant la "normalisation" des relations entre les peuples de la région. Les options militaires, attestées par la guerre  contre Gaza, mettent hors de piste de l’UPM, son auteur. Elles bloquent, hélas, la construction de cette aire euro - méditerranéenne… A  à moins que l’UPM n’institue, comme priorité, la résolution de ce conflit qui a trop duré et qui conditionne l’établissement des rapports normaux entre tous les partenaires de son espace.

L’assainissement de l’environnement doit précéder la réalisation des programmes de coopérations à l’échelle de l’UPM. Il ne faut pas attendre un quelconque concours de circonstances. L’affirmation d’une volonté de l’Union Européenne, conforme à  son discours fondateur doit avoir comme objectif de forcer le destin et de reconstruire les nouvelles fondations de l’aire de coopération souhaitée. Peut-on compter sur une mobilisation générale de tous les hommes épris de paix, sans restrictive, dans l’ensemble de notre espace euro-méditerranéen ?



Profeseur Khalifa Chater

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- Michael Emerson,  Editorial : "Just Monitoring Crises" in CEPS European Neighbourhood Watch 45).

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