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11 mai 2009 1 11 /05 /mai /2009 08:19

A la veille de la définition de la stratégie du Président Obama, pour dynamiser le processus de paix au Moyen-Orient et finaliser la solution préconisée de deux Etats, de «nouveaux jeux de rôles» se manifestent sur la scène politique moyen orientale et internationale. Effets d’annonces, tests, processus d’occultation, volontés de blocage, repositionnement, comment expliquer ces velléités d’intervention d’acteurs soucieux de se manifester dans cette conjoncture ? Grâce à la révision de la politique américaine, annoncée par le Président Obama, la question palestinienne est désormais à l’ordre du jour. Ce fait, qui a comme objectif d’instaurer une ère de paix, au profit de tous les habitants de la région, suscite des inquiétudes et des espoirs. Faut-il s’en étonner ?

Tony Blair, le représentant du Quartet, a affirmé, le 7 mai, à Beitlahm que les négociations du processus de paix doivent concerner l’essentiel, à savoir les questions de Jérusalem, des frontières de l’Etat et  des réfugiés qui concernent la situation finale. Fut-elle  tardive, cette intervention révèle une volonté de sortie des méandres des institutions conjoncturelles successives (la feuille de route, le Quartet, le processus d’Annapolis), qui permettaient de gérer la question et non de la traiter.  Mais nous remarquons que la proposition de Blair de se concerter avec les nouvelles autorités américaines pour mettre sur pied un nouveau mécanisme de paix, était bel et bien, en contradiction avec l’approche globale qu’il vient de faire valoir. Tony Blair a  cru devoir anticiper, accompagner ou recadrer les discussions du Président Obama, avec les acteurs de la région. Comment expliquer cette quête d’institutions tactiques, alors que la paix nécessitait tout simplement la mise en œuvre, l’application des discours, à l’appui du diagnostic de consensus de la communauté internationale.

D’auteurs acteurs non identifiés - sans doute,   des leaders informels mais importants et qui agissaient dans les coulisses - ont demandé une re-actualisation de l’initiative de paix arabe. Une telle procédure est surprenante, puisqu’on demandait l’adoption de nouvelles concessions, en faveur d’un partenaire qui refusait d’engager jusqu’ici un débat sur la question.  Ce stratagème permettait de susciter la division et de remettre en cause une initiative qui a fait l’objet d’un consensus. Réunis au Caire, le 8 mai, les ministres arabes des Affaires étrangères ont pris la décision de ne pas entacher leur plan de paix par de nouvelles concessions.

La tournée du ministre des Affaires étrangères israélien, Avigdor Lieberman, en Europe occidentale (4- 7mai 2009) constituait un non -événement. Les positions extrémistes qu’il a défendues, remettant en cause le processus de paix, étaient incompatibles avec le discours officiel européen. Fait d’évidence, qu’on ne doit pas perdre de vue, la démarcation entre les positions du triumvirat israélien  (le Président Péres, le Premier Ministre Natinyaho et le dirigeant extrémiste Lieberman) relevait plutôt d’un jeu de rôles, annoncé d’ailleurs par la condition lancée comme une pierre dans la mare, de la nécessaire reconnaissance d’Israël, comme « Etat juif ».

Est-ce que la communauté internationale peut se mobiliser pour imposer cette paix, qui assurerait la normalisation des relations entre les acteurs du Moyen-Orient ? Est-ce que le Président Obama sera en mesure de convertir la nouvelle équipe israélienne, en partenaire de la paix ?

Pr. Khalifa Chater

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4 mai 2009 1 04 /05 /mai /2009 14:54
La géopolitique a son " langage des signes ". Au-delà des faits saillants, qui marquent l’actualité, où les médias exercent un processus de trie nécessairement subjectif et partisan, l’observateur averti doit rechercher les "signes", susceptibles d’annoncer les faits d’avenir, ou du moins les éventualités possibles. Faits d’annonce ou présages, ces signes constituent des éléments de la "géopolitique prospective"  ou "virtuelle". Ils ne doivent, en aucun cas, être occultés ou sous-estimés. Des signes pertinents, coexistent avec les importants repères de l’actualité internationale, cette semaine, telles l'épidémie de grippe A/H1N1 et la pandémie "imminente", qu’elle peut annoncer, l’évolution de la question du Moyen-Orient, les enjeux, ambitions et mises à l’épreuve de la politique américaine. Tentons une lecture de ces signes qui risquent d’avoir leurs effets d’entraînement ou même de marquer la géopolitique de demain :
1 - La création d'une cour d'appel islamique pour la vallée de Swat et d'autres régions du nord-ouest du Pakistan, annoncé le samedi 2 mai. Concession majeure du gouvernement pakistanais, dans le cadre d'un accord de paix destiné à mettre fin à deux années de combats entre les forces de sécurité et les talibans, cette décision dépasse son cadre  conjoncturel.  Elle risque d’avoir valeur de précédent, dans cette conjoncture de débat entre les partisans d’une vision passéiste et les défenseurs d’une promotion moderniste de l’aire musulmane. A juste titre, Washington dénonça, comme une capitulation, l'accord de paix conclu en février, qui annonçait cette mesure. Cette décision doit être replacée dans le contexte de la guerre d’Afghanistan et les dérives qu’elle mettait à l’ordre du jour, outre son extension au territoire pakistanais. Ne faut-il pas réévaluer la politique américaine dans cette contrée dévastée par une longue guerre  d’usure, enclenchée durant la guerre froide. Elle doit également faire valoir  un traitement politique de la question afghane, dans le cadre de la construction d’un consensus de la communauté internationale.
2 - L'augmentation récente des importations d'équipement militaire dans le Moyen-Orient et particulièrement dans les pays du Golfe. Le journal  Khaleej Times, rapporta, le 30 avril 2009, que les Etats Arabes Unis ont été classés troisième acheteur d’armes dans le monde, derrière la Chine et l'Inde. D’autre part, l'Arabie Saoudite et l'Irak ont effectué d’importants accords d’achat d’armes. L'augmentation de ces dépenses militaires atteste une perception des menaces régionales, en relation avec l’affaire iranienne et les craintes d’une intervention israélienne, qui "mettrait le feu aux poudres". Il représente un effort par les Etats de l’aire de devenir plus indépendants militairement du bouclier américain. Or la baisse du prix du pétrole et les effets de la crise économique risquent de limiter la marge de manœuvre des pays pétroliers.

3 - Les agences de presse ont annoncé dimanche 3 mai que les troupes russes barrent les frontières géorgiennes avec l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud, les deux régions séparatistes, mettant en application l'accord signé jeudi entre la Russie et ces deux régions. Ce déploiement russe qui intervient quelques jours avant le début des exercices de l'OTAN en Géorgie, re-actualise le conflit entre la Russie et la Géorgie, déclenché le 7 août 2009. Il exprime des velléités du pouvoir russe d’affirmer ses prérogatives dans son aire géopolitique d’antan et de surveiller les nouvelles alliances de ses anciens protégés. Il ne s’agit, en aucun cas, d’un retour à la guerre froide, vu l’état des rapports de forces. Mais ces repositionnements de la Géorgie, de l’Union Européenne, des Etats-Unis et de la Russie peuvent exercer des freinages et peut être mettre à l’épreuve la stabilité régionale.  

Quelle est la signification de ces "présages", dans l’identification des nouveaux enjeux de la géopolitique internationale ? 

Pr. Khalifa Chater
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8 avril 2009 3 08 /04 /avril /2009 22:18

Les questions internationales étaient les priorités de l’ordre du jour, la semaine dernière : Ce fait est attesté par la tenue, en présence du  nouveau Président américain, du G20, alternative non encore déclarée à l’ONU, du Sommet de l’Otan, qui peine à se légitimer, en l’absence de l’ennemi qui constituait sa raison d’être et du Sommet U. E. /USA, censé redynamiser les relations atlantiques. Outre la réunion du G 20, dont l’enjeu était lié à la crise économique mondiale, qui nécessitait une concertation générale, pour rétablir la confiance, sinon assurer la relance économique, les deux autres réunions - fussent-elles de hauts niveaux - traitaient des questions courantes. Durant sa période faste, le Président Obama était soucieux de répondre aux attentes générales et de rétablir les bonnes relations des USA avec ses partenaires européens, peu enclins à admettre l’unilatéralisme institué par les néo-conservateurs.

 En marge de cette tournée européenne, le Président Obama a tenu à marquer son terrain, annonçant sa nouvelle politique en Asie centrale et au Moyen-Orient. Privilégiant la Turquie, considérée comme plateforme de la sécurité dans la région, il y annonça la nouvelle politique américaine vis-à-vis de l’Islam, définit son approche de la question iranienne et affirma l’attachement du gouvernement américain à la création de l’Etat palestinien. Son voyage non annoncé à Bagdad, devait rappeler les engagements qu’il avait pris lors de sa campagne présidentielle.

Ce souci de relations apaisées avec l’Iran - si  les négociations annoncées le confirment  et cette volonté  d’établir des contacts avec la Syrie, confortée par sa détermination favorable au processus de paix dans l’aire moyen orientale, peuvent induire une nouvelle donne, remettant en cause ou du moins l’atténuant cette division en axes, cette grave démarcation géopolitique qui divise le monde arabe. Elle peut favoriser l’établissement d’un meilleur environnement international à la politique d’entente, mise à l’ordre du jour par les sommets du Koweït et de Doha.

Mais le nouveau gouvernement israélien, qui vient d’être investi occulte la question des deux Etats et les processus de la feuille de route et de la réunion d’Annapolis. Pouvait-il encore constituer un partenaire de paix, alors qu’il renie ses engagements internationaux ? Des observateurs semblent privilégier ce constat, qui, en fin de compte le sert, puisqu’il lui permet de sauvegarder les acquis coloniaux. Il serait plus judicieux de faire fonctionner les mécanismes opératoires de l’ONU, de l’Union Européenne et des Etats-Unis, pour lui imposer ce règlement de la question palestinienne, condition Sine Qua none, de l’établissement de relations de normalisation, dans le concert des nations.

 

Pr. Khalifa Chater

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22 janvier 2009 4 22 /01 /janvier /2009 11:30

"Faisons un rêve", disait Luther King…. Avec l’accession au pouvoir de Barak Hussein Obama, ce rêve est devenu une réalité, pour les Américains et peut être pour le monde, après le cauchemar de la guerre d’Irak, les effets du slogan du "choc des civilisations" et les culpabilisations de l’autre qui s’en suivirent… Le nouveau Président restitue à l’Amérique son prestige, par un retour à ses normes et à ses valeurs fondatrices. Réconciliant les Etats-Unis avec eux-mêmes, intégrant son patrimoine culturel et moral et le conjuguant avec ses mutations d’avant-garde, il annonce une nouvelle ère, érigeant l’utopie salvatrice en réalité.

Le discours d’investiture du président Obama, une synthèse d’un programme audacieux, car novateur, confirme et précise ses engagements de campagne. Barak Obama regarde le monde autrement, par une relecture et une prise en compte des fondamentaux de l’Amérique :

«Nous savons que le patchwork de notre héritage est une force et non une faiblesse. Nous sommes une nation de chrétiens et musulmans, juifs et hindous et non-croyants. Nous sommes issus de chaque langue et chaque culture venue de chaque coin de cette Terre; et parce que nous avons goûté à l'amertume de la guerre civile et de la ségrégation, et que nous sommes sortis plus forts et plus unis de cette épreuve, nous ne pouvons pas nous empêcher de croire que les vieilles haines finiront par disparaître; que les frontières tribales seront bientôt dissoutes; qu'à mesure que le monde devient plus petit, notre humanité commune se révélera, et que l'Amérique doit jouer son rôle, en ouvrant la voie à une nouvelle ère de paix».

Revendication du multiculturalisme, magistrale condamnation de l’approche de Hutington et de la guerre contre l’autre, qu’elle a mise à l’ordre du jour. Cette évocation de "notre humanité commune" et cette volonté solennellement affirmée de rappeler  " le rôle de l’Amérique ouvrant la voie à une nouvelle ère de paix", prennent toute leur signification dans cette conjoncture de guerres préventives, de démonstrations de forces, d’usage d’armes massives, dans des guerres coloniales bien archaïques :

«Pour ce qui est de notre défense commune, nous refusons de faire un mauvais choix entre notre sécurité et nos idéaux… Ces idéaux éclairent toujours le monde et nous n'y renoncerons pas par opportunisme. Aussi, à tous les autres peuples et gouvernements qui nous regardent aujourd'hui, des plus grandes capitales au petit village où naquit mon père : sachez que l'Amérique est l'amie de chaque nation et de chaque homme, femme et enfant qui aspire à un avenir de paix et de dignité, et que nous sommes prêts une fois encore à ouvrir le chemin… ».

La puissance au service de la paix … ! Cette offre généreuse à tous les peuples et gouvernements, mérite d’être méditée. Dans cette ère post-guerre froide qui a occulté le tiers-mondisme, le Président Obama rappelle, avec des accents émotionnels et personnels, la nécessaire prise en compte de tous, des  "plus grandes capitales au petit village où naquit son père ". Les Etats-Unis qui réhabilitent le monde, qui mettent toutes ses composantes sur le même pied d’égalité, qui ne revendique pas, bien au contraire, des velléités d’hégémonie et de puissance.

Dissipant les malentendus, soucieux de faire échec à tout discours de culpabilisation et/ou d’exclusion, Barak Hussein Obama adresse un message particulier au monde musulman, affirmant la volonté du nouvel Establishment américain de chercher une nouvelle façon d'avancer fondée sur "les intérêt mutuels et le respect mutuel". Elargissant sa réflexion à tous les pays, Il les invite à ne pas "imputer les maux de leur société à l’Occident". Cette référence implicite à la dynamique interne des nations est une condamnation de toutes velléités d’ingérence. Point de leçons à donner, mais une simple invitation aux dirigeants à travers le monde, à la construction, au service de leurs peuples.

Ce discours d’investiture, qui définit une nouvelle approche géopolitique internationale, annonce un vaste programme et suscite de grandes attentes. Prenant le pouvoir dans une conjoncture difficile, Barak Obama sait que d’immenses chantiers l’attendent, qu’il doit agir sur plusieurs fronts : crise économique, chômage, quotidien américain, questions du Moyen Orient et traitement des questions internationales d’actualité, dans le cadre de la redéfinition de la politique étrangère américaine etc. Pourrait-il réussir ce défi, à partir du diagnostic sérieux et pertinent qu’il a présenté, dans son discours d’investiture ? 

Professeur Khalifa Chater

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11 octobre 2008 6 11 /10 /octobre /2008 14:10

Il n’appartient pas à tout le monde de traiter la crise financière. Faut-il cependant la passer sous silence, alors qu’elle risque d’affecter notre quotidien ? Ne serait-il pas inopportun, d’autre part, de confier le monopole des analyses aux experts financiers, au risque d’occulter la donne géopolitique qui échappe à leur compétence ? Certaines vérités méritent cependant d’être rappelées :

1- Dans le cadre de l’économie monde, la crise est appelée à connaître une extension quasi universelle. Alors que ses premières manifestations sont apparues aux Etats-Unis, la crise a émigré presque instantanément vers le monde occidental. Peut-elle épargner le Sud, l’ancien Tiers-monde et ses Etats émergeants ? Dans un autre temps, la crise de 1929 a exercé ses effets néfastes partout dans le monde, y compris les colonies reliées alors aux attelages métropolitains. Or, depuis lors, la mondialisation a fait des progrès d’envergure.

2 - Les concertations entre les puissances semblent privilégier un traitement consensuel de la crise. Cela concerne davantage le discours. La réalité est bien plus complexe. Peut-on parler d’un sauve qui peut ? Nous n’en sommes pas encore là. Mais le régime capitaliste est fondé sur la compétition, la concurrence, la rivalité, la lutte pour conquérir les marchés et maîtriser les sources de matières premières. La diplomatie commerciale des puissances est à l’ordre du jour, avec les stratégies préventives qu’elle implique. Dans quelle mesure est-ce que la nouvelle conjoncture ne favorisera pas la re-actualisation de la guerre de l’Euro et du dollar, par exemple ?

3 - Faut-il rejeter les thèses de ceux qui évoquent une orchestration de la crise et se risquent à s’interroger sur ces maîtres d’oeuvre, qui auraient par la suite, l’opportunité de retirer les marrons du feu. La complexité des jeux underground ne permet pas de dégager une réponse. Dans une large mesure, le jeu international s’opère comme un théâtre d’ombres, dont la scénographie ne montre que des figurants. D’autre part, on n’est pas encore en mesure de savoir à qui la crise doit profiter.

4 - Serait-il hasardeux d’affirmer que la tension internationale peut être mise en relation avec la campagne électorale américaine, pour servir le clan républicain et faire échec aux partisans du multulatéralisme et de la concertation internationale. Des observateurs ont avancé cette thèse et évoqué, à l’appui, les velléités de retour à la guerre froide. Les progrès actuels d’Obama, si l’on en juge d’après les enquêtes pré-électorales, ne semblent pas en mesure d’étayer cette thèse. Et d’ailleurs, la situation internationale actuelle et la prise de conscience de l’opinion américaine inciteront nécessairement le nouveau président américain, qu’il soit démocrate ou républicain, à réviser l’unilatéralisme, à se mettre à l’écoute  du monde et à favoriser un retour aux normes américaines.

5 - Fait d’évidence, la crise a révélé qu’elle était une conséquence d’une dérive  de l’application du capitalisme libéral. Après la mise en échec du communisme, certains ont crû devoir ou pouvoir instituer un capitalisme sauvage et débridé. La crise est en mesure de remettre les pendules à l’heure, de condamner le jeu spéculatif et d’imposer une moralisation de la gestion, au profit de tous.  Prenons la juste mesure de ce rappel à l’ordre.

 

Khalifa Chater

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15 septembre 2008 1 15 /09 /septembre /2008 21:17

Dans quelle mesure est-ce que le voyage du Président Nicolas Sarkozy en Syrie (3-4 septembre) constitue un événement historique, susceptible de changer la donne géopolitique au Moyen-Orient ? L’ère post-guerre froide, qui a institué l’ordre monopolaire, a assuré une prédominance américaine dans cette aire et limité la marge de manoeuvre des puissances européennes, sur cette scène. La prise de distance du Président Chirac de la politique engagée par l’Establishment américain, en Irak, a permis à la France d’affirmer son autonomie de décision et de gagner l’opinion publique arabe, traumatisée par l’intervention militaire et la « pacification », qui s’en suivit. Cette politique, qui aurait vraisemblablement, des effets bénéfiques dans le long terme, l’a cependant exclu naturellement, lors des partages des bénéfices de l’opération (pétrole, marchés de reconstruction, alliance avec le nouveau pouvoir de Bagdad). Le rapprochement franco-américain lors du traitement de la question libanaise et la révision de la politique américaine de la France, par le Président Sarkozy, - nous n’irons pas jusqu’à parler de son atlantisme - n’ont pas changé profondément la donne, en dépit d’une coordination évidente de la politique des deux acteurs occidentaux en Afghanistan. Les faits géopolitiques sont têtus. Ils consolident, pour longtemps, les bénéfices du leadership.

Le Président Nicolas utilise les opportunités de la nouvelle conjoncture à savoir l’éclipse électorale américaine, fut-il ponctuelle, l’exercice par la France de la présidence de l’Union Européenne et les velléités de changement de la politique syrienne, qui a révisé sa politique au Liban et engagé des négociations indirectes avec Israël. L’impasse de la question du nucléaire iranien -   puisque l’Europe s’oppose à Téhéran mais ne peut se résoudre à soutenir une riposte militaire américaine ou israélienne contre lui - incite le Président français à solliciter une entremise syrienne, pour inciter l’Iran à répondre avec bienveillance aux propositions européennes. La «normalisation » de ses relations avec la Syrie permettrait à la France d’assurer sa présence sur la diplomatique proche orientale, dominée par les Etats-Unis. D’ailleurs, le président français a affirmé, le 4 septembre, que la Syrie «avait un rôle à jouer» dans la résolution de tous les conflits de la région qui « sont liés ». Et ne perdons pas de vue les objectifs industriels et commerciaux de la politique française.

De ces points de vue, le voyage du Président Sarkozy fut couronné de succès. Il lui a permis d’assurer une plus grande présence française sur les marchés syriens, de confirmer le rapprochement libano-syrien, de tenter une opportunité de dialogue avec Iran et de proposer le parrainage de la France, aux négociations indirectes israélo-syriennes.  Cette percée française sur la scène moyen-orientale doit néanmoins s’accommoder des rapports de forces dans la région et de la nécessaire participation des USA au processus de paix, que le Président syrien, par réalisme politique, rappela publiquement, au cours de la conférence de presse, mercredi. D’autre part, les pourparlers Assad/Sarkozy n’avaient pas l’ambition de décrocher la Syrie de l’axe Téhéran-Damas. Alors que Sarkozy demandait au Président Assad de transmettre son message au pouvoir iranien, Assad lui rappela la politique traditionnelle syrienne, en faveur de la dénucléarisation du Moyen-Orient et défendit l’argumentaire iranien, en faveur de l’utilisation du nucléaire civil, expliquant la crise par un simple manque de confiance entre les acteurs. L’entretien Sarkozy/Assad permit de dissiper les malentendus, de rapprocher les points de vues, par une transgression bien opportune de la politique d’exclusion et de culpabilisation. La France a eu le mérite de considérer l’unique Etat laïc du Moyen-Orient arabe comme un partenaire pour la stabilité de l’aire, à la merci des dérives intégristes.

L’organisation, jeudi 4 septembre, d’un sommet quadripartite -baptisé « Dialogue pour la stabilité » - et  réunissant, outre la France, Présidente de l’Union Européenne, la Syrie, Présidente de ligue des Etats Arabes, le Qatar, Président du Conseil du Golfe et la Turquie, organisatrice des négociations indirectes entre la Syrie et Israël, devait engager des concertations entre ces importants acteurs sur les questions de la stabilité, de la paix et de la sécurité dans l’aire. Pouvait-on évoquer la mise sur pied d’un axe alternatif, susceptible d’assurer une nouvelle direction diplomatique de la scène moyen-orientale ? Sans doute devrait-on prendre la mesure de l’occultation du leadership de l’Egypte et de l’Arabie Séoudite ? Fait évident, ce sommet consacre de nouveaux acteurs, en relation avec les nouvelles priorités (négociations indirectes, question iranienne etc.) et les interventions de nouveaux acteurs et/ou protagonistes sur la scène. Nous avons évoqué le message français à l’Iran, par l’entremise de la Syrie. D’autre part, l’Emir du Qatar a affirmé, lors de ces assises, qu’il «ne faut pas introduire les pays du Golfe dans une guerre contre l’Iran ». De son côté, le Président Bachar al-Assad a affirmé que la situation dans le Caucase, suscite son inquiétude. Il ne veut pas, dit-il, d’une nouvelle guerre froide dont le Proche-Orient ferait les frais, puisqu’il deviendrait son aire de confrontation.

A cet effet, il a affirmé que ce sommet, n’a pas pour objectif de créer de nouvelles zones d’influences, qu’il avait comme ultime objectif de servir la paix et la stabilité et qu’il a évoqué le rôle des USA, après les prochaines élections. Même politique de prudence du Président Sarkozy, qui rappela le rôle de l’Egypte et de l’Arabie, absentes de cette instance. Le Sommet quadripartite privilégia néanmoins de nouveaux acteurs et met à l’ordre du jour de nouvelles approches diplomatiques. Est-ce à dire que nous sommes en présence d’un nouveau tournant au Moyen-Orient ? Disons plutôt que ces entretiens expriment des velléités, traduisent de nouvelles attentes internationales, européennes et arabes. Mais peuvent-ils réellement mettre à l’épreuve les données effectives sur le terrain.

Chasses croisées, des voyages du Président Sarkozy dans le Machrek (l’Orient) et de la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, au Maghreb. Après une visite historique en Libye, vendredi 5 septembre, où elle a rencontré vendredi le leader libyen Mouammar Kadhafi et ouvert un nouveau chapitre entre les deux anciens ennemis, Condoleezza Rice a poursuivi sa mission en Tunisie, Algérie et au Maroc.

Professeur Khalifa Chater

 

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21 août 2008 4 21 /08 /août /2008 09:40

«La fin de la menace massive ne signifie pas la paix. Si l’illusion était tentante, la prolifération des crises et conflits hors d’Europe (Irak) ou en Europe même (dans l’ancienne Yougoslavie qui éclate avec l’URSS, dans le Caucase, aux confins asiatiques de l’ancien empire) devrait vite la dissoudre... » (Dominique David Sécurité : l’après-New-York Presse des Sciences Po. Paris 2002  p. 17). 

Le déclanchement de la guerre de Géorgie engage un re-examen de la géopolitique internationale, une re-évaluation des mutations du jeu des acteurs sur la scène-monde, une redéfinition de notre conjoncture d’histoire immédiate appelée hâtivement post-guerre froide. Dans son analyse pertinente, Dominique David, estime que la fin de la guerre froide, constitue « une révolution » tout en étant « une non-guerre» et il fait  valoir que le « différentiel de puissance » dont s’assure désormais les Etats-Unis met fin à «l’antagonisme des blocs militaires»  (Dominique David Sécurité : l’après-New-York op.cit. pp. 12-15).  Bien entendu, les considérations stratégiques étaient confortées par la « guerre idéologique », entre le capitalisme et le communisme, permettant aux deux protagonistes de légitimer leur différend et de définir leurs aires d’alliances.

Dans ce contexte de l’après-guerre froide, du désaveu du communisme en Europe centrale et orientale et de l’homogénéisation idéologique qu’il engagea, la Russie se résigna à voir ses anciens alliés quitter le bateau. Plusieurs d’entre eux rejoignirent l’Union Européenne et/ou de l’Otan.  L’Ukraine et la Géorgie engagèrent le processus de leur intégration dans le club atlantiste. Assumant leur alignement, la Pologne et de la République Tchèque permirent aux Etats-Unis d’envisager de déployer sur leur sol, leur bouclier anti-missile, soi-disant, pour protéger leur territoire contre d'éventuelles attaques de pays comme l'Iran. Situation asymétrique, caractérisée par l’éloignement de la menace des Etats-Unis et de la défense territoriale qu’elle implique, alors que la Russie a comme voisins des alliés du clan adverse. Sur les autres scènes (Irak, Palestine Afghanistan Iran etc.) la Russie dut prendre acte de son statut d’acteur de deuxième niveau, sinon de comparse, dans l’ère monopolaire. En dépit de l’entrée sur la scène internationale, d’autres acteurs, particulièrement l’Union Européenne et la Chine, le jeu géopolitique reste dominé, dans une certaine mesure, par « les adversaires-partenaires» (expression de Raymond Aron) de la guerre froide. Mais les Etats-unis ont profité de la redimension effective de leur challenger de la guerre froide et de la rupture de l’équilibre bipolaire qui s’en suivit, pour étendre, comme on l’a vu, leurs moyens et leurs champs d’action.

Dans cette analyse de l’enchaînement des faits depuis la chute du mur de Berlin, il apparaissait que Moscou a «peu de chance de reconstruire, à moyen terme, une vraie puissance extérieure avec une capacité de projection militaire massive » (Ibid, p. 16). Or, la guerre de Géorgie semble annoncer un tournant, vu le processus de redynamisation militaire (intervention en Géorgie) et diplomatique (position différentielle sur la question du nucléaire iranien), mis en oeuvre par l’Establishment russe. Le duel américano-russe pourrait s’engager, par acteurs interposés, dans le nouveau contexte. Nous retrouvons les termes de référence identifiés par l’analyse de Dominique David : «Au temps de l’affrontement EST-OUEST, dit-il, la garde du sanctuaire était première, centrale, l’action extérieure marginale ». Or, désormais « l’essentiel de la problématique est tourné vers l’organisation de l’intervention de stabilisation extérieure (op. cit. p. 19).

Dans la crise actuelle, le rôle de l’Union Européenne et du Président Sarkozy, a permis d’élaborer, dans l’urgence, un accord de cessez le feu. Les observateurs ont souligné l’attentisme américain, tempéré par un engagement diplomatique, la pause de réflexion atlantiste et l’absence du consensus nécessaire au sein du Conseil de Sécurité. Le compromis conjoncturel du cessez le feu, a eu certes, le mérite d’arrêter les affrontements meurtriers ; mais il laisse plusieurs questions en suspens, difficiles à régler par les instances internationales. Peut-on exclure, comme geste de sagesse, un accord bilatéral lorsque les relations seront apaisées ? 

Notons, dans le cadre des repositionnements signalées, dans l’aire de voisinage de la Russie, son ancien glacis protecteur, la signature le 20 août à Varsovie, par la Pologne et les Etats-Unis d’un accord de coopération militaire qui prévoit l'implantation d'ici 2012 de dix intercepteurs capables de détruire en vol d'éventuels missiles balistiques à longue portée. L’empressement des signataires s’explique par l’escalade de la guerre de Géorgie. La présence à sa frontière de ce bouclier antimissile et le déploiement, en Pologne, des batteries anti-aériennes de dernière génération ne sont pas de nature à dissiper les craintes de la Russie. Des interventions militaires préventives, contre la Russie ou la Pologne ne peuvent plus être exclues. Elles sont susceptibles de remettre à l’ordre du jour la course aux armements.

Comment définir, dans ces conditions, la nouvelle ère qui s’annonce ? Fin du monde monopolaire ? Retour à la guerre froide ou du moins à la course aux armements ? Prémices d’un monde multipolaire ? Peut être faudrait-il tout simplement inscrire les guerres de l’ère post-guerre froide dans les effets d’une géopolitique de puissance et des affrontements qu’elle annonce et génère ? Nous pensons plutôt qu'il serait prématuré de conceptualiser les soubresauts de cette conjoncture.  

 


Professeur Khalifa Chater

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9 août 2008 6 09 /08 /août /2008 14:43

Fait indéniable, la Russie et la Géorgie  sont désormais en guerre. Le déclenchement dans la nuit du jeudi à vendredi, par l'armée géorgienne d'une offensive militaire contre sa région séparatiste pro-russe rebelle d'Ossétie du Sud -  a mis le feu aux poudres. L’armée russe a pris fait et cause pour les habitants de l’Ossétie, dont l’allégeance à la Russie est incontestable et rappela pour légitimer son intervention militaire, le vendredi 8 août 2008, que plusieurs d’entre eux disposaient, de passeports russes.

Les discours des protagonistes  attestent que la situation reste grave et assez confuse. Le nombre des victimes de la « pacification » géorgienne - 1400 habitants d’Ossétie du Sud, selon le président ossète, Edouard Kokoïty et bien entendu de nombreuses victimes des affrontements russo-géorgiennes -, l’escalade qui s’en suivit et les risques de l’internationalisation  rendent la situation géopolitique bien préoccupante.

Prenons la juste mesure de la gravité de cette nouvelle guerre de l’ère post-guerre froide, inaugurée par la guerre d’Irak et le bouleversement du Moyen-Orient qu’elle a provoqué.  A la suite de l’implosion de l’URSS, la Géorgie confirma sa déclaration d’indépendance. Mais elle dut prendre acte de l’affirmation de l’autonomie des deux républiques de l’Abkhazie au nord-ouest et de l’Adjarie au sud-est, ainsi que de la région autonome de l'Ossétie dans le centre-nord du pays. Suite à cette volonté d’intégration nationale et de l’émergence du mouvement séparatiste contestataire, la Géorgie riposta militairement contre les Ossètes (1990 -1992), suite à la déclaration d'indépendance de l'Ossétie du Sud en 1990 et contre les sécessionnistes abkhazes (1992 -1993). Ces conflits s’expliquaient par l’affirmation des ethnies et/ou des nationalités, lors des restructuration des anciens Etats de l’URSS et des velléités de re-équilibrages qu’elles ont mise à l’ordre du jour.


 

Abkhazie, Adjarie et Ossétie du Sud = territoires autonomes

Source : Présentation générale et données démolinguistiques,

proposée par l'Université canadienne de Laval, in www.tlfq.ulaval.ca/axl/Asie/georgie.htm

Fait important, le renversement des alliances de l’ère post-guerre froide et le rapprochement de la Géorgie des Etats-Unis, illustré par l’envoi de troupes en Irak (plus de 2000 soldats), en attendant son entrée annoncée dans l’OTAN, ne pouvaient que susciter les inquiétudes de l’Establishment russe, qui redoute les effets du re-alignement de ses anciens alliés, qui sont de surcroît dans son aire de proximité et de sa profondeur géostratégique. Faut-il négliger, comme dessous des cartes, la question pétrolière ? La Géorgie est, en effet, traversée par l'oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan, construit pour acheminer vers l'Europe les hydrocarbures de la Caspienne en échappant au contrôle de la Russie. Elle est, désormais, un Etat de transit pour le gaz et le pétrole.

Comment interpréter les affrontements de Géorgie ? Est-ce  que la Russie veut affirmer qu’elle n’est plus disposée à se laisser faire et qu’elle veut surveiller son aire de voisinage, ou du moins y affirmer sa présence ? Sommes-nous les témoins d’une nouvelle politique russe, qui tout en ménager la puissance monopolaire, tient à faire échec à tout engagement déclaré en sa faveur ? Est-ce que cette politique russe est en mesure de calmer les élans de ses anciens alliés, pour empêcher leur re-alignement contre elle ? La suite des événements permettra de clarifier la situation, en relation avec les rapports de forces et les marges de manoeuvre respectives des différents acteurs sur la scène internationale. Wait and see.

 

Professeur Khalifa Chater

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21 mars 2008 5 21 /03 /mars /2008 10:20

 

Personne n’a songé à brûler des cierges pour fêter l’anniversaire de l’invasion de l’Irak, le 20 mars 2003. Du point de vue des intérêts géopolitiques de ceux mêmes qui l’on engagé, on peut difficilement parler d’une stratégie victorieuse. Un régime dictatorial a été, certes, aboli. Mais le chaos qui l’a remplacé, l’émergence d’un pouvoir ethnique et la guerre civile qu’il a déclanché n’ouvraient pas de perspectives prometteuses. "la vitrine démocratique", qu’on se proposait d’ériger en modèle, d’après le grand  objectif/alibi du discours, s’inscrivait sur le terrain des réalités, comme un contre-modèle.

La "guerre contre le terrorisme islamiste" a été détournée de sa cible. On ne pouvait rechercher la Kaïda sur le terrain irakien où elle était bannie, pourchassée. Le vide institutionnel, le chao gouvernemental et l’amalgame entre les résistants de tous bords, a permis à la Kaïda de s’installer dans le sanctuaire irakien, d’y développer ses ramifications et d’engager ses opérations kamikazes, prétendant exercer le monopole de la lutte contre l’occupant. L’instrumentation  de la cause irakienne lui permet de consolider ses structures et de multiplier ses relais dans des guerres anachroniques, au service d’un repli nostalgique, qui dessert toute ouverture de l’horizon et toute stratégie de promotion. Dans l’immédiat, elle remet en cause la stabilité régionale.

Le grand journal arabe el-Hayet fait remarquer, à juste titre, dans son évaluation de cette guerre que "l’Irak est devenu l’espace des conflits régionaux alors que l’Iran est le plus grand bénéficiaire de la guerre [1]". En effet, l’Iran est désormais l’unique puissance régionale dans l’aire. Débarrassé de son ennemi historique, l’Iran assure son entrée en Irak au profit de l’émergence du pouvoir chïte dans la région. Les derniers entretiens du président Ahmedi Nejed avec les pays du Moyen-Orient, son invitation par le Conseil du Golfe, attestent, que les pays de la scène moyen-orientale réalisent qu’ils doivent avoir comme interlocuteur, cet important acteur de la région, s’affranchissant diplomatiquement des vues du gouvernement américain.

L’évaluation devrait, bien entendu, prendre en compte la comptabilité macabre des pertes humaines dans les deux camps et de la montée vertigineuse du prix du pétrole, du fait de cette conjoncture, en dépit de la maîtrise de ce bassin pétrolier important. Est-ce que la sortie de crise qui ne semble pas aisée, est en mesure de rétablir la situation, d’assurer la paix, la sécurité, de meilleurs conditions de vie et pourquoi pas  d’instituer une bonne gouvernance au-dessus des ethnies et des clivages religieux, selon l’éthique du XXIe siècle ?

 

Khalifa Chater

20 mars 2008

chaterkhalifa@topnet.tn

 

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[1] - El-Hayet, 20 mars 2008.

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29 novembre 2007 4 29 /11 /novembre /2007 12:53

Au-delà de la reprise des négociations !

 Enfin … « la conférence de la paix» vient de se réunir, mardi 27 novembre et de conclure ses travaux … En tant qu’initiative américaine, acte d’autorité de l’hyperpuissance, elle suscita une grande mobilisation des acteurs et des médias. Optimistes ou pessimistes, les observateurs avisés ne pouvaient que saluer cette prise en considération de la tragédie palestinienne, comme question essentielle, définissant les positions des populations de la région, déterminant, in fine, les alliances fondamentales des Etats, dessinant la carte géopolitique du Machrek/Maghreb, concept que nous préférons à ceux du Moyen-Orient  et du Great middle East, liés aux stratégies coloniales et postcoloniales. Il faut prendre la mesure de cette révision de la politique du Président Bush, à l’épreuve du terrain, qui traduit une appréciation géopolitique globale, incluant nécessairement les attentes des populations. Bush continuant Clinton, cette mise à l’ordre du jour de la continuité présidentielle américaine, après sa mise en parenthèse, je dirais son  interruption tragique, lors de la guerre contre l’Irak, ouvre de nouvelles perspectives dans les relations internationales, au profit de tous les habitants de l’aire. On ne peut que s’en réjouir de la stratégie de réconciliation générale, qu’elle annonce, qui de surcroît conforte le statut international des Etas-Unis, lui permettant de dépasser ses options stratégiques préférentielles.

« C'est le début d'un processus, non son aboutissement», déclara le Président Bush, lors de l’ouverture de la conférence internationale d'Annapolis. Est-ce à dire qu’on se proposait de recommencer le feuilleton des négociations antérieures et qu’on remettait en cause les acquis des assises précédentes, accords d’Oslo, en 1995, sommet de Taba (2001), options de la Feuille de route (2003) ? Les observateurs s’attendaient plutôt à une conclusion du processus, en poursuivant les discussions précédentes et en les finalisant, en application des références de l’Onu, sur la question. D’autre part, l’accord de Genève, proposé, en l’an 2003, par Yasser Abdrabbo et Yossi Bellin, permettait de déblayer le terrain.  Pour quoi occulter ces acquis ? Il ne peut être question de revenir sur des positions de principe, telles l’évacuation des territoires occupées, la décolonisation totale, le traitement de la question des réfugiés et les multiples conséquences de cette politique de confiscation générale des biens, des terres, de l’eau, des routes etc. Ce marchandage permettrait au mieux, aux Israéliens de gagner du temps. Faut-il mettre sur le compte des pertes et profist l’impact de ses effets de ressentiments sur les populations victimes ?

Notons cependant l’importance de la décision de reprendre les négociations bilatérales, pour conclure un accord avant la fin de 2008.  L’engagement pris par le pouvoir américain, pour finaliser l’accord, devant créer un Etat palestinien, est en mesure de hâter la conclusion de l’accord, d’exercer une pression énergique, pour traiter la question, ouvrir les horizons, dans le respect du référentiel de l’Onu, de l’éthique de décolonisation et du respect des Droits. Il s’agit d’une Condition Sine qua none.

Faut-il surestimer les définitions du Président Bush des nouveaux Etats : « la Palestine comme patrie palestinienne, tout comme Israël est la patrie du peuple juif » (discours inaugural de la conférence) ? ِِ Ces pseudo préalables ethniques ne peuvent être pris en considération, dans la mesure où ils impliquent le renvoi d’un million et demi de citoyens arabes d’Israël et l’annulation de la loi du retour des réfugiés. Mais ne perdons pas de vue que la dynamique des négociations peut changer les points de vue des partenaires les plus retords. Or, outre la volonté américaine, le souci d’Israël de connaître une ère de paix  et de s’intégrer dans son aire - par  une normalisation arabe nécessairement conditionnée par la conclusion de l’accord -, constituent des arguments de poids pour transgresser les partis pris.

 

Professeur Khalifa Chater

 chaterkhalifa@topnet.tn


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